Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le burn-out
Episode 1 : Qu’est-ce qu’un burn-out ?

« Hier j’ai fait un burn-out » ; « Le burn-out, c’est une invention à la mode pour cacher que le travail cause des dépressions » ; « Mon médecin m’a mis en arrêt parce que je ne dors plus à cause du travail qui me stresse mais moi je pense que c’est un burn-out » ; « Un de mes salariés, un peu fragile, est en arrêt pour une semaine, il paraît qu’il est en burn-out » …
Difficile aujourd’hui de ne pas avoir un avis sur le burn-out tant le mot s’est répandu et est désormais utilisé par de nombreuses personnes pour désigner des situations très diverses. Alors qu’est-ce que le burn-out ? Une fatigue chronique ? Du stress ? Une dépression professionnelle ? Sans prétendre au rétablissement d’une quelconque vérité rigide et universelle, voyons un peu ce qui se cache derrière ce fameux burn-out pour mieux comprendre ce dont il s’agit.
En français, « burn-out » se traduit par « syndrome d’épuisement professionnel ». Un syndrome étant un ensemble de signes et de manifestations, le burn-out n’est pas une maladie diagnosticable sur le plan clinique, comme peut l’être une dépression par exemple, mais plutôt un ensemble de symptômes qui peuvent apparaitre chez une personne en réaction à leur environnement de travail (c’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles le burn-out n’est pas reconnu comme une maladie professionnelle actuellement : il semble complexe d’établir des liens clairs de cause à effet entre des symptômes réactionnels et des facteurs de risques professionnels).
Ces symptômes peuvent se cumuler, ne sont pas forcément tous présents dans un cas de burn-out et sont les suivants :
(Attention : ces symptômes ne sont pas typiques du burn-out, on les retrouve également dans le stress chronique par exemple. D’ailleurs, une situation de stress chronique peut déboucher sur un burn-out…)
- Manifestations émotionnelles : angoisse ou peurs indéfinies, humeur triste, baisse de la motivation ; augmentation de l’irritabilité ou au contraire émoussement des émotions, un peu comme si l’individu semblait être devenu « insensible ».
- Manifestations physiques : troubles du sommeil, fatigue chronique, tensions musculaires, maux de tête, nausées, vertiges.
- Manifestations cognitives : diminution de la concentration, difficultés à réaliser plusieurs tâches à la fois, baisse de la capacité de mémorisation.
- Manifestations comportementales et sociales : isolement et repli sur soi, perte d’intérêt pour les autres, voire agressivité et sentiment d’hostilité envers les personnes côtoyées au travail ; apparition ou augmentation de la consommation de certains produits (tabac, alcool, médicaments, drogues…) ; diminution de l’engagement au travail.

En quoi le burn-out est-il différent du stress chronique ?
Le stress chronique au travail est l’exposition répétée et durable à des situations professionnelles induisant chez un individu la perception d’un déséquilibre entre les contraintes que lui imposent son environnement de travail et les ressources dont dispose cet individu pour faire face à ces demandes. Exemple : un salarié qui doit quotidiennement faire face à une charge de travail sur laquelle il doit rendre des comptes à son encadrant mais qui a l’impression de ne pas disposer de suffisamment de temps ou de moyens pour atteindre les objectifs fixés. Si ce fonctionnement s’installe dans la durée et que certains des symptômes vus ci-dessus apparaissent, on pourrait alors parler de stress chronique (qui peut déboucher sur des pathologies graves telles que la dépression ou des troubles anxieux !).
Le burn-out quant à lui, en plus d’être un ensemble de symptômes évoqués ci-dessus, se traduit par un processus progressif de dégradation du rapport subjectif au travail qui aboutit à 3 dimensions : un épuisement émotionnel, un cynisme vis-à-vis du travail et une baisse de l’accomplissement de soi au travail. En d’autres termes, c’est une période durant laquelle un travailleur, confronté à des situations professionnelles trop exigeantes sur le plan émotionnel, va épuiser toutes ses ressources et se retrouver dans l’obligation, pour se protéger psychologiquement face aux exigences émotionnelles que lui impose son travail, de mettre une distance, un peu comme une barrière de protection, entre lui et son travail d’une part, ainsi qu’entre lui et les personnes côtoyées au travail d’autre part (collègues, usagers, client, patients, élèves, etc.) Ces réactions, installées progressivement et souvent à l’insu de la personne, peuvent avoir comme conséquence une dévalorisation de soi et une perte de l’identité professionnelle, c’est-à-dire une diminution de l’accomplissement personnel au travail. Il importe également de différencier burn-out et dépression notamment dans la mesure où le burn-out a des causes spécifiquement professionnelles, reste davantage cantonné au domaine professionnel et traduit un processus réactionnel avec des étapes alors que la dépression peut avoir d’autres causes que l’environnement professionnel, s’étend à tous les domaines de vie et traduit plutôt un état qu’un processus (mais un burn-out peut déboucher sur une dépression et certaines dépressions sont réactionnelles).
Trois dimensions sont caractéristiques du burn-out
Première dimension : l’épuisement émotionnel
L’individu est épuisé émotionnellement, psychiquement et physiquement. Il a utilisé toutes ses ressources pour essayer de faire face aux demandes de son environnement professionnel et ces ressources se sont épuisées. Il ressent alors une intense fatigue qu’il ne parvient pas à récupérer avec les temps de repos habituels. L’épuisement émotionnel est central dans le burn-out et peut se manifester par des changements de l’humeur (par exemple de la tristesse suivie d’une manifestation d’impulsivité voire d’agressivité), ou par des difficultés à ressentir des émotions ou à comprendre celles des autres (on parle alors d’un « émoussement affectif »).
Deuxième dimension : le cynisme vis-à-vis du travail
Parce que l’individu ne dispose plus comme auparavant des outils d’interaction et de motivation que sont les émotions, mais aussi pour préserver sa santé, une réaction instinctive de mise à distance psychologique de ce qui menace l’intégrité psychique de l’individu, à savoir ici le travail, peut apparaître. Ce phénomène auto-protecteur de désengagement de la personne par rapport à l’environnement menaçant peut induire chez la personne une attitude détachée, froide, distante voire « déshumanisée » vis-à-vis des autres personnes liées au travail (usagers, patients, collègues, direction, etc.) mais également vis-à-vis du métier en lui-même, avec des conceptions, propos et représentations très critiques, péjoratives et négatives envers le travail. Dans le cadre d’un syndrome d’épuisement professionnel, l’individu peut avoir de grandes difficultés à faire preuve d’empathie, c’est-à-dire à utiliser sa capacité à se mettre à la place de l’autre pour comprendre ses émotions : ceci est évidemment particulièrement problématique dans les métiers où l’humain est au cœur de l’activité professionnelle, comme dans le milieu du soin ou de l’enseignement par exemple.
Troisième dimension : une diminution de l’accomplissement personnel au travail
Souvent, cette expérience d’épuisement complet, combinée à une réaction de cynisme et de désengagement du travail, amène la personne à percevoir la situation comme un échec. Elle peut alors fortement se dévaloriser, constatant que malgré tous ses efforts elle n’a pas pu gérer la situation. Cela peut se traduire par le sentiment de ne pas être compétent et de ne pas être à la hauteur, amenant parfois une remise en question de l’identité professionnelle voire de l’identité globale.
Dans le prochain épisode, vous saurez tout sur les causes du burn-out...

A propos de l'auteur
Quentin THEVENON est Psychologue du Travail à Toulouse. Il vous accompagne en cabinet et en entreprise pour vous aider à mieux vivre vos situations professionnelles difficiles telles que le stress/la souffrance au travail ou le mal-être au chômage/la recherche d'emploi. Son parcours